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Tottenham : Le poids des espoirs



Qui a dit que Novembre était le pire mois de l’année? Temps de merde, déprime, bilan, regrets… sorry mate, not this year! En ce glorieux 2/11/2021 une nouvelle illumine mon fil Instagram au milieu des bots et des spams: le compte officiel Tottenham Hotspur FC publie une photo d’Antonio Conte brandissant fièrement la mythique tunique. Blanche et marine. Non l’italien n’est pas en visite chez les Spurs comme cela arrive à beaucoup d’anciens joueurs, entraîneurs ou personnalités venus se faire rincer et serrer des louches. Non, en ce 2 novembre, 24h après avoir chassé l’esprit sain de la maison, le club du Nord de Londres nous pond son meilleur post depuis… Depuis combien de temps au fait??


On s’en fout, ANTONIO CONTE ladies & gents! Un nom à faire rêver les enfants, un palmarès à faire fantasmer les grands, une gueule à faire aimer le foot à ta belle-mère, vient de s’engager comme manager du club pour les deux prochaines saisons. Au moins.


Ça alors… Le même Antonio Conte qui avait « refusé » le job durant l’été. Oui parce que Nuno Espirito Santo, débarqué la veille par l’impitoyable président des Spurs n’avait fini par signer un contrat qu’après le refus d’une bonne dizaine d’entraîneurs contactés avant lui. Dans le désordre Conte donc, ses compatriotes Allegri, Pioli et Gattuso (même si avec ce dernier on a eu très chaud), Brendan Rodgers (pas con il a choisi de rester à Leicester), Ten Hag (pourquoi quitter un club bien plus mythique et structuré?), et même Paulo Fonseca, qui s’était permis de faire la fine bouche, tirant le frein à main à la dernière minute pour des raisons fiscales, version officielle.

Nuno donc, faute de mieux. Fallait voir. Pas le choix de toute façon. Et puis bim, Nuno « Manager of the month » en Août steuplé. Même avec un temps automnal, certains ont eu besoin de se mouiller la nuque car entre le chant du cygne estival de Harry Kane, skipper déterminé à quitter le navire, un recrutement à chialer (mis à part Romero, et le bénéfice du doute, ou de l’espoir pour Gil) et surtout, bien sûr, le poids de l’habitude de la déception, on n’attendait rien de cette nouvelle saison avec le barbu aux platines. Alors même sans fond de jeu, même sans réellement vibrer, on n’allait pas bouder le plaisir de voir les Spurs en haut de tableau après trois journées. L’avantage, quand on connaît l’oiseau à éperon, c’est qu’on n’est pas non plus tombé de l’échelle au moment de l’inévitable retour à la normale : 3 défaites d’affilée après les 3 victoires inaugurales. La suite : 2 succès et 2 défaites. Ni bon, ni mauvais, enfin quand même plutôt pas terrible.


Obrigado Nuno, Ciao Antonio! Du mal à y croire on vous dit. Un mec qui ne sait faire que gagner? Sur le banc de Tottenham? Vous êtes sûr Monsieur Levy? « J’ai été convaincu par l’enthousiasme communicatif de Daniel Levy" déclare Conte lors de sa présentation aux médias. Vous êtes sûr Antonio?! « L’enthousiasme communicatif » sérieux… même pas la force d’en rire, trop excité de voir ce que ça va donner.


Parce que oui, pour un supporter de Tottenham depuis qu’il est en âge de regarder du foot, il faut tout de même se pincer. Conte a tout gagné en tant que joueur avec la Juve, et sur le banc des trois grandes équipes qu’il a coachées (Juventus, Chelsea, Inter) il a remporté tous les championnats qu’il a disputés, à une exception près, l’année où il se fait virer par Abramovitch et sa patience légendaire. Au milieu de tout ça l’ancien gregario de Zizou a même réussi à faire repousser ses cheveux. Fuoriclasse.


D’aussi loin que je me souvienne, j’ai aimé Tottenham dès la première fois que je « les » ai vus jouer. 1991, finale de la FA Cup. À l’époque elle est diffusée sur TF1. Oui sur TF1. Victoire face à Nottingham Forest.

« Tottenham », un nom chelou, mais sublime au fond. Et ce maillot… Ce blanc, ce bleu marine, difficile de faire plus classe. Les joueurs, enfin, surtout : Gary Lineker, Paul Gascoigne, qui m’avaient fait rêver au Mondial italien l’été précédent. Quelques semaines plus tard j’apprendrai que Chris Waddle, le joueur auquel je pense alors chaque soir avant de m’endormir, jouait lui aussi à Tottenham avant d’enfiler le maillot Panasonic. Lorsque vous vous découvrez une nouvelle divinité, sa maison devient votre chapelle. C’est probablement Magic Chris, ses dribbles, son pied gauche et sa nuque longue qui ont achevé de faire de Tottenham un club à part dans mon coeur.


Waddle, Gascoigne, Lineker, le maillot, le nom, l’élégance, le talent, le panache, et à l’époque pas encore la lose. En 91, je n’ai pas encore 9 ans, le foot anglais n’est rien pour personne sur le vieux continent. Sa Premier League n’est encore qu’un projet et ses clubs viennent tout juste d’être réintégrés aux Coupes d’Europe après 5 saisons de bannissement. Le temple du ballon est en Italie, où le « Calcio » monopolise l’attention des fans en même temps que les stars du jeu et les dithyrambes des observateurs.


S’intéresser au foot anglais au début des 90’ c’est déjà chelou, alors aimer Tottenham, est au choix du hipsterisme avant l’heure ou un signe de grande détresse sentimentale. En tout cas ça permet de faire le malin devant les copains, rares à connaître ne serait-ce que l’existence du club. Quelques années plus tard, le premier maillot, rapporté de Londres par papa. Floqué « Holsten », évidemment. Trésor. Relique. Doudou d’attardé. À l’époque l’Equipe du Dimanche est le seul moyen de voir un but marqué hors de France, et le business des maillots n’existe pas encore chez nous, Aucune boutique de sport n’en vend, et internet, et e-commerce n’existent que dans la tête des auteurs de science-fiction.


Mon daron a du mal à comprendre mon émotion. « C’est vrai qu’il est joli quand même » consentira-t-il tout juste. Moi je dors avec, évidemment. Jurgen Klinsmann vient de signer chez les Spurs. Après avoir rincé la « D1 » avec Monaco l’allemand fait une pige à White Hart Lane. Une seule saison, le temps d’y rester pour toujours une légende (avant de signer au Bayern, tellement moins drôle).


Klinsi ou le symbole de ce qui a toujours été, depuis, le seul intérêt de supporter de ce club : admirer, pour quelques temps, des joueurs sexys qui viennent faire décoller leur carrière, la relancer, ou tenter de se faire une statue, celle du mec qui aura enfin fait gagner, bref un bouquet garni de promesses aux destins variés : David Ginola, Les Ferdinand, Chris Armstrong, Steffen Freund, Serguei Rebrov, Dimitar Berbatov, Gareth Bale, Roman Pavlyuchenko, Luka Modric, Roberto Soldado, Hugo Lloris, Tanguy Ndombelé… Leur seul point commun? Ils n’ont rien gagné avec le club évidemment. Et que personne ne parle de la League Cup de 2008, remportée avec Juande Ramos (vérifiez, à l’époque l’espagnol était censé devenir un des meilleurs managers du monde…) elle n’est qu’une humiliation supplémentaire pour les supporters du club.


Et pourtant, la passion d’un White Hart Lane blanc et marine les après-midis de match donne des frissons. Éternel regret que de n’y être jamais entré avant sa démolition. Je n’en aurai connu que l’extérieur, le temps tout de même d’acheter un pin’s « Campbell’s a cunt » et une plaque commémorative vendu dans un attrape-touristes, qui trône depuis dans mes toilettes. Il faut croire qu’on a le temple que l’on mérite.


Si l’on avait plus de temps, on pourrait parler de la fondation du club (1882 tout de même), de son emblème ou de l’origine de ses couleurs. « Audere est facere » dit en latin la devise de la maison, sous le coq chaussé de ses éperons (les « spurs »). Traduisez « Oser c’est faire ».


Dommage que ça ne veuille pas dire « oser c’est gagner ». Un truc qui en revanche jusqu’ici veut dire gagner, c’est Antonio Conte. Alors, cette fois-ci la balance penchera-t-elle du côté de la lose éternelle et néanmoins élégante ou du côté du winner patenté et exigeant?


Les supporters du Tottenham Hotspur FC peuvent en tout cas enfin rêver de succès. Ils peuvent même y croire, et moi avec eux. Au milieu d’eux. Au pire, on se consolera tous avec ce putain de romantisme propre au fan de n’importe quel club brit, si magnifiquement résumé dans notre cas d’espèce par l’acteur Jude Law qui déclara un jour : « Être supporter de foot, ce n’est rien d’autre que de s’habituer à la défaite. Je le sais, je suis supporter de Tottenham depuis que j’ai 6 ans». Il est peut-être temps qu’Antonio Conte écrive une belle histoire pour les enfants du North East London.


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